"En ces temps difficiles, il convient d'accorder notre mépris avec parcimonie, tant nombreux sont les nécessiteux." Chateaubriand

lundi 2 janvier 2012

Bonnes résolutions ou l'angoisse de la page blanche



Il parait qu'avec la nouvelle année vient généralement la prise de quelques bonnes résolutions. Qui n'a jamais sacrifié à ce rituel? Même si je dois avouer que pour moi c'était souvent plutôt que début janvier à mon retour de vacances d'été quand il faisait encore beau, que j'étais reposé et en pleine forme. Et souvent c'était quand même des choses assez basiques comme me coucher moins tard pour pouvoir me lever plus tôt en forme, un peu comme celle que j'avais à ce retour des vacances, tout en sachant néanmoins instinctivement que d'ici à quelques semaines, avec le raccourcissement des jours, c'est en grognant que je sortirais de mon lit avant de prendre un café sur le pouce, parfois, afin de ne pas arriver à la bourre au boulot, à défaut de ne pas y arriver le gueule dans le cul. J'ai toujours pensé que le monde n'était pas fait pour les gens qui comme moi se couchent à des heures pas possibles parce que c'est là où ils se sentent le mieux.
Bon là je m'égare ou plutôt je noie le poisson car face aux bonnes résolutions que je devrais prendre, là maintenant, afin d'avoir au moins quelques instants de bonne conscience dans l'année, je reste un peu sec. De fait je me rends compte que pour prendre de bonnes résolutions, il faut-être capable au préalable de faire son autocritique. Car prendre de bonnes résolutions c'est envisager soit de se bonifier, voire de se corriger, soit d'agir de façon davantage bénéfique sur son environnement, ce terme devant être pris bien sûr au sens le plus large. Or pour cela il faut avoir pris la mesure de ses défauts, de ses faiblesses ou de ses lacunes. D'où la nécessaire autocritique préalable à toute prise de bonne résolution. Et là bien sûr je commence à m'inquiéter. Pourquoi ma feuille reste-t-elle désespérément blanche quand il s'agit d'exposer mes bonnes résolutions de début d'année? Serait-ce pour moi le signe d'une incapacité à effectuer cette fameuse autocritique préalable au reste? Pourtant je ne me sens pas véritablement fier et sûr de moi, arrogant, au point de ne pas me trouver quelques défauts, hors des classiques que ma femme ne cesse de me rappeler bien sûr, de ne pas découvrir de possibles voies d'amélioration de ma personne, de ne pas penser à certaines attitudes qui pourraient être bénéfiques à mon environnement. Mais les personnes fières et sures d'elles, arrogantes ont-elles toujours conscience de l'être? Pas sûr. Peut-être le suis alors à mon insu? D'où cette incapacité à faire une autocritique préalable. Mais alors là, si je me mets à admettre cette hypothèse, du moins à la transformer en vérité, j'ai donc trouvé un premier lot de bonnes résolutions car être fier et sûr de soi ainsi qu'arrogant ce n'est pas un ensemble de qualités (à prendre au sens de caractéristiques) très en vogue en ce moment où les faveurs se dirigent plus volontiers vers les faibles et les opprimés. Alors certes, je ne peux guère me transformer en Palestinien génocidé depuis une bonne soixantaine d'années, je ne peux guère me transformer en chômeur puisque je bénéficie déjà d'une pension de retraite, je ne peux guère me transformer en SDF, du moins pas dans l'immédiat, je ne peux guère me transformer en sans-papiers sauf à vouloir provoquer les autorités de mon pays d'accueil. Alors, que faire?
 
A partir des caractéristiques personnelles que j'ai devinées et admises pour vraies, faute en ce début d'année d'avoir les idées assez claires (noter : moins forcer sur la vodka lors du prochain réveillon – au moins voilà déjà une bonne résolution) pour envisager d'autres approfondissements je peux quand même imaginer quelques pistes pour m'améliorer et contribuer à un meilleur épanouissement de mon environnement.
 
Prenons tout d'abord la fierté. Mais qu'est-ce d'abord que la fierté? Ça peut être la dignité, l'amour-propre, enfin en gros le respect de soi-même. Ça peut-être aussi une certaine autosatisfaction, le sentiment d'avoir bien mené sa vie, ou d'avoir réussi quelque chose, ponctuellement ou sur la durée. Ou encore quelque chose qui pourrait s'apparenter à du mépris pour les autres. Du coup je ne sais pas si je dois choisir ou prendre le lot. De fait la récente découverte de mes qualités intrinsèques commence déjà à me mettre dans l'embarras. Que dois-je faire? Me mépriser après m'être superbement négligé? Cracher sur mon passé, sur tout mon passé? Devenir un grand philanthrope? Pas simple.
D'autant plus qu'il y a des trucs là-dedans qui ne devraient pas trop plaire à ma femme. Qui fait quand même partie de mon environnement. Et en même temps il faut que les effets de mes bonnes résolutions se fassent sentir, notamment auprès de ceux qui se donnent parfois la peine de me lire, et que je dois considérer comme faisant aussi partie de mon environnement. Je crois que j'ai trouvé un truc qui devrait contenter tout le monde. Car je sais ce qu'on me reproche parfois sur la blogosphère. Je pense que je devrais abdiquer de la fierté que je revendique d'appartenir à la civilisation européenne, à la nation française et à ses vieilles valeurs. Il faut que désormais je me fasse le chantre de la diversité, du relativisme culturel et du communautarisme. Bref que je renonce à une certaine fierté d'être français. Et ça devrait peut-être même satisfaire mon épouse qui ne l'est pas, elle (je rajoute ce "elle" assez inélégant, je dois le reconnaitre, d'un point de vue stylistique. Mais ayant appris à mes dépens que sévissent sur cette blogosphère d'éminents et surtout d'éminentes exégètes ainsi qu'ils mais surtout elles le revendiquent, capables de me faire dire ce que je n'ai pas dit, je préfère préciser par ce "elle" que mon épouse est effectivement mon épouse mais n'est pas française).
Voilà donc une première bonne résolution de prise.
 
Passant maintenant à l'assurance. Ou la confiance en soi. Etre sûr de soi a pu passer autrefois pour une qualité, mais généralement méprisée par ceux qui ne la possèdent pas et vous vanterons les vertus de l'humilité ou de la modestie. Je n'ai pas forcément le sentiment d'être toujours sûr de moi, le doute venant parfois ronger mon esprit. Signe quand même qu'il y a peut-être des pistes d'amélioration chez moi. Ceci dit si ce défaut peut être perçu pas certains de mes lecteurs, il n'en est pas moins partagé par beaucoup de ceux qui s'expriment sur la blogosphère, tellement sûrs d'eux-mêmes souvent qu'ils ne prennent même plus la peine de distinguer entre faits et idées, les secondes devenant dans leur cerveau dont je me demande parfois s'il n'est pas en voie de calcification, aussi solides que les premiers. Ce qui conduit parfois à des situations bizarres chez des gens qui hurlent à la tolérance mais ne peuvent supporter la contradiction, comme si effectivement leurs opinions étaient des faits lesquels sont par nature dès qu'ils sont révélés incontestables, sauf parfois par des esprits tordus qui transforment les faits qui leurs déplaisent en opinions pour pouvoir les discuter, ou plutôt les contester. Même que désormais la loi commence à s'en mêler pour punir ceux qui nient certains faits.
Mais tout cela est même plus compliqué encore. Prenons par exemple le racisme et les religions. Il y a un siècle et moins encore, l'anthropologie, mesures à l'appui, tentait de nous démontrer que les races existaient, qu'il y en avait de supérieures et des inférieures. Avec les dégâts occasionnés que nous connaissons tous. Mais le racisme, faute d'éléments probants, ne pouvaient être qu'une opinion, une idée à partir de laquelle tout devenait possible : l'horrible ou la volonté de faire bien quand il s'agissait d'aller civiliser les races inférieures. Quand plus tard la génétique a démontré que l'idée de race était complètement farfelue, et que les faits s'y opposaient, c'est devenu non plus une opinion que d'être raciste mais un délit. Mais ça aurait pu aussi rester du niveau de la connerie ou de l'inculture. Et voilà maintenant que certains veulent étendre les conséquences d'une donnée scientifique aux religions, en fait surtout une religion, et donc transformer en délit les actes ou paroles blasphématoires vis-à-vis de cette religion. Et force est de reconnaitre que cette connerie rencontre quand même un succès assez large. Comment cela serait-il possible d'en arriver là sans un certain aplomb des individus parvenant à transformer une religion en race dès lors qu'on ose la critiquer. Il faut quand même avoir une certaine confiance en soi-même pour en arriver là. J'ai quand même beaucoup de mal à me reconnaitre là-dedans.
D'où mon questionnement sur l'attitude nouvelle que je devrais adopter dans le cadre des bonnes résolutions de début d'année. Soit peut-être être plus nuancé, par exemple ne plus dire en réaction aux "printemps" arabes que ce n'est certainement bas une bénédiction pour les peuples des pays concernés, et surtout pas pour nous. Soit carrément jouer les gentils, ceux qui projettent leurs rêves dans le réel et dire sur le même sujet que c'est magnifique, que ces peuples vont enfin connaitre une liberté qu'ils auront été cherché eux-mêmes et qu'il n'y a surtout pas lieu de s'inquiéter de voir les islamistes gagner les élections puisque ces derniers sont évidemment modérés et n'auront de cesse de nous le prouver. Il s'agit donc pour moi de devenir assez nuancé pour ne plus finalement exprimer ce que je pense, ou encore de faire la carpette et de rentrer dans le moule de cette sirupeuse bienpensance avec son monde de bisounours.
J'y réfléchirai.
 
Finissons par l'arrogance, qui est certes un vilain défaut. Comme synonymes de ce terme, on trouve supériorité, mépris, dédain, morgue, insolence, impertinence. Et comme antonyme la déférence, le respect ou la courtoisie. Il est d'usage désormais d'entendre à tout bout de champ le mot "respect". Utilisé d'ailleurs souvent par des personnes qui n'en manifestent guère pour les autres et qui en fait se lamentent, mais parfois de bien curieuse façon, pas courtoise en tout cas, qu'on ne leur reconnaisse pas une certaine supériorité. Alors ça peut venir du trou du cul de banlieue qui exige le respect en brûlant la bagnole de son voisin, ou encore de celui, souvent blogueur, n'accepte pas d'avis contradictoires à sa pensée forcément supérieure. Certes, il vous criera sa tolérance mais en accusant l'autre, non pas d'irrespect, mais de connerie, connerie qu'il ne peut d'ailleurs souvent pas supporter. Il pourrait certes s'abstenir de prendre cette connerie en pleine poire en s'abstenant de l'aller observer de trop près, mais même quand celle-ci l'évite soigneusement, elle le dérange malgré tout. Je me méfie toujours des gens qui se déclarent prêt à discuter de tout, qui le clament haut et fort, mais qui dans les faits n'acceptent au mieux que les nuances et, au pire, le cirage de pompe, pour rester poli. C'est une engeance pas mal répandue finalement sur les blogs cachant son autosatisfaction, l'assurance d'être dans le bon camp, celui de la morale évidemment, la certitude d'avoir toujours raison derrière une fausse humilité, derrière une tolérance purement de façade.
Je crois finalement qu'avec le temps les mots ont perdu beaucoup de leur sens. Alors qu'une discussion peut-être animée certes mais polie et surtout argumentée, opposant des conceptions parfaitement différentes aurait pu passer à une certaine époque comme une marque de respect, ce n'est plus le cas désormais. Car le respect maintenant exige forcément qu'on soit d'accord avec la personne que l'on interpelle. Tout au plus peut-on lui opposer quelques nuances qui ne feront que conforter la thèse initiale. Sinon on est un impertinent, un arrogant et même un con qui n'a pas sa place là quand la blogosphère en question est plutôt circonscrite à des gens ayant des opinions proches et n'ayant donc qu'à s'auto-congratuler, se féliciter entre eux de tant de hauteur de vue, d'humanisme ou je ne sais quoi, se faire la bise, se pâmer d'aise devant leurs écrits respectifs, se déclarer amis pour la vie…
Que faire alors pour mériter le respect et ne plus être assimilé à un arrogant, un impertinent ou un importun? Eh bien peut-être s'adapter. Compter les jours jusqu'au 6 mai et bientôt les heures et rappeler comment les choses allaient merveilleusement bien il n'y a même pas 10 ans quand la gauche gouvernait. En fait passer du statut d'arrogant à celui de faux-cul.
 
Tout compte fait, faisons fi pour cette année encore des bonnes résolutions. Les temps de la repentance et de la rédemption ne sont pas encore venus.

 

1 commentaire:

  1. un texte pour analyse et synthèse niveau licence, au moins
    je n'aime pas les bonnes résolutions et avec le temps qui passe je me suis évité du boulot impossible puisque ce qui nous réoriente est le groupe, l'âge, la tendance à lâcher certaines choses paraissant moins vitales
    et ce qui nous tient est une colonne centrale indestructible sauf à être torpillé par les troubles de la personnalité qui font qu'on se transforme en caricature et stéréotypes
    cette colonne ne souffre aucun compromis cédé à l'autre et au groupe
    elle est ce que nous sommes et tenons à être
    le bastion
    hors donc,décider d' arèter de bouffer, picoler, fumer, s'astreindre à je ne sais quoi que nous ne faisions pas est bénéfique peut être
    mais décider de renforcer la sécurité de notre bastion est primordial

    je refléchirai plus avant, mais quand vous décidez d'agir sur votre environnement pour le conforter, je pense que j'ai jeté une bouteille vide en verre dans la poubelle déchets ménagers en la planquant dans le sac,pas envie de courir 500 mètre
    c'est mon côté insolent, pardon

    proverbe yéménite: la pierre s'érode, l'homme ne change pas

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