"En ces temps difficiles, il convient d'accorder notre mépris avec parcimonie, tant nombreux sont les nécessiteux." Chateaubriand

mardi 1 janvier 2013

Réponses à deux commentaires sur ma lettre ouverte au président-pseudo-historien



 
Je réponds ici à deux commentateurs de ma note " lettre ouverte à notre-président-pseudo-historien". Ma réponse est effectivement trop longue pour figurer en tant que commentaire. Ou j'aurais dû tronçonne, ce qui ne facilité pas la compréhension.

Le premier que j'appellerai A1 (anonyme 1) me parait d'après la teneur de ses propos être soit africain, soit originaire d'Afrique. Je lui souhaite d'ailleurs de ne pas faire partie de la seconde catégorie, car comme nombre de ses congénères parvenus en France par on ne sait quel coup funeste du destin, il devrait alors éprouver beaucoup de souffrance à vivre au milieu d'un peuple autant honni.

Voilà son commentaire :
"Les Français sont prêts à insulter la mémoire des Africains, ils ne veulent et ne supportent pas qu'on révèle leurs tristes vérités.
Voici pour exemple, l'insulte de la France à l'Afrique: Tout le monde sait que les présidents africains ne célèbrent jamais leurs héros, de peur que la France encore coloniale dans son esprit et ses pratiques ne s'abattent sur eux. Curieusement, au cinquantenaire des indépendances africaines, la France a fait la récupération en emmenant les Africains à venir célébrer en France celui là même qui a été le véritable bourreau des Africains, le Général de Gaulle.
Notre ami de Moscou se fout du monde; j'admire son verbe, mais il me semble très peu civilisé et ne mérite pas la France plus que Hollande. Si la France veut être respectée, elle doit d'abord restituer les indépendances africaines confisquées à travers la monnaie Franc CFA en prison dans le trésor français, dégager les bases militaires en Afrique et qui génèrent des génocides, et mettre fin aux accords d'escroquerie, secrets et léonins avec les dictatures africaines."

Les Français ne supporteraient donc pas "leurs tristes vérités". Mais quelles vérités, mon cher A1? Les Français vivent dans un pays libre, ont accès à une littérature abondante, variée et non censurée sur leur histoire, et quand cette histoire veut être dite par l'Etat, le Président, le Parlement, c'est souvent pour mettre la France en accusation sur une période particulière de son histoire, et sans faire de nuances. Quand par exemple, notre président parle de la culpabilité de la France lors de la rafle du Vel d'Hiv, il amalgame une France occupée, avec une France qui a pris les armes contre l'occupant. Personnellement je préfère l'image de la France de Londres que celle de l'autre sans toutefois ignorer le rôle qu'on tenu des Français pendant ce tragique épisode de leur histoire. Vous voyez, cher A1, je, mais aussi nombre de Français, ne me voile pas la face, suis capable de regarder ce que vous appelez les tristes vérités, et qui en sont. Mais en même temps j'essaie de voir les événements dans leur globalité, pas ce qui me plait ou ce qui me déplait. Tout, toute l'histoire. Et dans le discours de Hollande, je n'ai pas retrouvé cela, mais juste une histoire épurée, juste une vision, celle qui pouvait plaire à l'ancien ennemi, mais qui ignorait le reste, les réalisations coloniales, la souffrance des Français d'Algérie dont 80% étaient des gens bien modestes et non des exploiteurs comme on voudrait le faire croire, et dont nombre d'entre eux n'avaient jamais vu la métropole et se sentaient sans doute aussi Algériens que les Français musulmans, selon l'appellation en vigueur à l'époque. Hollande a parlé de la torture, de crimes. Personne ne peut nier qu'il y ait eu torture et même des crimes, mais la guerre ne se résume pas à cela. Et les tortures et les crimes du FLN, envers les Français, envers leur propre peuple, ne devrait-on pas en parler aussi, alors qu'on annonce qu'on va dire la vérité sur l'histoire?

Vous parlez de célébrations de héros africains. Mais célébrez! Seulement dans un nombre de cas significatifs ces héros ont eux-mêmes été assassinés par d'autres Africains qui ont pris leur place et ainsi de suite, si bien que finalement vos héros sont sans doute mieux connus et peut-être célébrés davantage dans certains milieux, en France qu'en Afrique. Mais rassurez-vous! On commence à avoir du mal à célébrer nos propres héros, nos propres grands hommes. Vous avez peut-être suivi les péripéties pour trouver un lieu de sépulture digne de son rang et de sa gloire au général Bigeard . Il aura fallu deux ans pour cela, à cause des oppositions de toute une frange de gauchistes patentés, intellectuels, politiques, journalistes et autres sinistres individus. Vous aurez peut-être noté aussi que le bicentenaire de l'Empire fut copieusement oublié en France et davantage commémoré en Europe, là où la Grande Armée avait pourtant livré ses plus grandes batailles que dans notre pays. On envoya même en 2005 le Charles-de-Gaulle pour célébrer Trafalgar, mais aucun ministre ne participa aux commémorations d'Austerlitz. Napoléon et Louis XIV s'éloignent des manuels d'histoire au profit de Mahomet et du Monomotapa. Quant à Clovis, fondateur mythique de la France ou Charles Martel, ils sont passés depuis longtemps aux oubliettes de cette histoire enseignée à nos enfants, pour ne pas heurter ceux dont les parents sont venus d'ailleurs..
Eh oui, voilà où nous en sommes, mon cher A1. Ce ne sont pas les Africains que nous insultons, mais notre propre histoire.

Vous nous dites que le véritable bourreau des Africains fut de Gaulle. J'avoue ne pas trop comprendre. De mon côté je vois que les plus grands bourreaux des Africains furent les Africains eux-mêmes, et ça continue. On pourrait citer par exemple leur rôle dans l'histoire de l'esclavage, avec la traite arabe ou la traite interne concernant les noirs et même leur participation active à la traite Atlantique qui sans leur aide très active n'aurait pu avoir lieu. On pourrait rappeler leur rôle dans la colonisation qui sans eux n'aurait guère été possible non plus. Et on pourrait aussi parler du Libéria, de la Sierra Leone, du Rwanda, et de ce qui se passe au Congo actuellement. La liste n'est bien sûr pas exhaustive. Vous parlez des bases françaises en Afrique qui génèrent des génocides. Donnez quelques exemples pour être crédible. Pour ma part, je pourrais vous parler des génocides évités grâce à l'intervention des forces françaises.

Certes, je comprends que vous puissiez avoir des griefs contre la France. Et pas seulement contre elle, la communauté internationale est aussi dans le coup. Les décolonisations ont sans doute été mal menées, avec notamment leurs frontières ridicules ne correspondant à rien et dont on ne veut pas revenir sur l'intangibilité. Les occidentaux ont sans doute fait preuve de trop d'optimisme ou d'ethnocentrisme, mais peut-être de cynisme aussi, en pensant que finalement les rapports entre les Africains pourraient dépasser les appartenances ethniques. Certes ils ont eu bien tort. Chaque vote, pour peu qu'il ait quelque apparence de vote libre et démocratique, nous le démontre : ce n'est plus un vote mais un recensement ethnique et/ ou religieux. Evidemment ça nous ne connaissons pas, même si un jour ça risque de nous rattraper. Nous entreront alors dans les mêmes impasses que les Africains.
Mais de tout cela, de la décolonisation, de l'ingérence étrangère qui change de couleur, qui passe du blanc au jaune, et donc du constat que les Africains restent incapables après plus de 50 années d'indépendance d'affirmer leur pleine souveraineté et la prise de leur destin en main, nous pourrions en parler longtemps. Que les anciens colonisateurs qui ont prolongé leur présence, économiquement, militairement,…, aient des responsabilités, c'est un fait. Mais ça n'exonère pas les Africains des leurs.
Vous constaterez d'ailleurs ce qu'ont fait les dirigeants algériens depuis l'indépendance, et sans vraiment entrer dans la cadre de la Françafrique, je pense que vous en conviendrez, d'un pays pourtant disposant de richesses naturelles énormes. Rendre la colonisation responsable de leur incurie me semble bien malhonnête.

Sinon à part ça, j'habite Saint-Pétersbourg et non Moscou et je ne me moque de personne. Je ne sais pas si je mérite la France plus que Hollande et si je la mérite tout court. Ce n'est pas à moi d'en juger. Mais au moins j'aurai essayé de le faire, à ma manière, sous l'uniforme… et parfois en Afrique.
Je ne suis peut-être pas non plus civilisé. Pourtant je fais des efforts.

 

 
Je réponds maintenant à A2 (anonyme 2). Ça sera plus court, les thèmes abordés étant moins nombreux. Je crois deviner qu'A2 est algérienne.

Voilà son commentaire :
"Pourquoi vous qualifiez les Algériens de traitres? en quoi le sont-ils? parcequ'ils ont défendu leur terre? parcequ'ils ont voulu récuperer leurs biens? parcequ'ils ont voulu une vie digne et libre? On nie pas les aspects positifs de la colonisation.... mais ils valent quoi devant la souffrance des Algériens. Je ne parle pas seulement de la souffrance passée, mais celle vécue jusqu'a aujourd'hui conséquence de 132 ans de dénigrement, mépris, de dépuillement...de la crise d'identité que les Algériens vivent.
En quoi serait ce dégrandant pour une grande nation de reconnaitre ses crimes? de reconnaitres que les principes et les objectifs de la colonisation, même si louables, ont fini par produire une machine de massacre de peuples entiers.
l'Algérie n'était pas une patrie, peut être je ne connais pas trés bien l'histoire, mais il y'avait un peuple aussi ancien que celui de la France et peut être même plus ancien. Un peuple, dont le seul crime, était de vivre sur une terre trés convoitée...l'histoire le prouve avec tous les colonisateurs passés, car il faut dire que vous n'êtes pas les seuls.
Vous savez quand j'etais jeune, en lisant un livre d'histoire en Français, j'ai remarqué que les algériens étaient désignés d'indigenes, toute inocente que j'étais j'ai demandé aux grands sur la signification du terme, on m'a répondu que ca voulait dire " les natifs". En lisant un autre, j'ai découverts qu'on usait d'un autre terme pour tous les autres colonisés " autochtones", mais pas les Algériens, eux c'est des " indigenes". Vous voyez qu'est ce que la France a fait à l'Algérie et aux Algériens? 132 ans d'indigenat avec toutes les implications humaines, sociètales, psychologiques et culturelles induites?
Entre l'Algérie et la France, le passé demeure une page noir qu'il faut tourner pour vivre le présent et construire l'avenir!!!!!!! reconnaitre les crimes commis c'est permettre aux vivants de commencer une nouvelle page et aux morts de se reposer dans leurs tombes!!!! ( les Français et les Algériens)."

Vous dites que je qualifie les Algériens de traitres. C'est faux, complètement faux. Dans mon texte ce qualificatif s'applique à Audin et aux autres Français qui ont rallié les indépendantistes pendant la guerre. Les Algériens indépendantistes étaient des ennemis, pas des traitres, et donc respectables contrairement aux traitres.

Vous parlez de la souffrance des Algériens. Mais quels Algériens. L'Algérie est une construction de la France. Je vous renvoie à la citation de Fehrat-Abbas dans mon texte. L'Algérie en tant que patrie avant 1962 n'existe pas. Et à ce titre les Français d'Algérie étaient aussi Algériens que les autres.
Vous parlez de massacres de peuple. Certes il y a eu des massacres. La pacification n'a pas été un chemin semé de pétales de roses. Mais n'oubliez pas non plus de dire que la population locale a été multipliée environ par 10 pendant la période. Et les apports de la colonisation y sont sans doute pour quelque chose aussi.
Vous dites que les Algériens traversent une crise d'identité. Ce qui tendrait à prouver qu'ils ne sont pas vraiment un peuple ou que la nation algérienne, la toute jeune nation algérienne n'est pas fédératrice. Enfin, moi je crois surtout que c'est d'une crise économique chronique dont ils souffrent, leurs richesses étant confisquées par quelques-uns.
Je tiens par ailleurs, et c'est à double tranchant, à rappeler que la France a assez respecté l'identité des populations colonisées, en ne les forçant pas à se convertir en particulier, ce qui ne fut pas le cas lors des colonisations précédentes. En même temps, la conservation des identités permettait de traiter en inférieurs ces populations. Avec en corolaire cette notion d'indigénat que vous rappelez.

Reconnaitre ses crimes, dites-vous? Mais qui les a niés? La conquête de l'Algérie est connue et a été racontée. La guerre connait encore quelques zones d'ombres sur quelques points particuliers, mais l'ensemble est suffisamment connu pour que les crimes des uns et des autres soient bien connus. Que faut-il de plus? Prendre des morceaux de cette longue histoire commune, ceux qui nous montrent comme des assassins, des criminels, des tortionnaires, des exploiteurs, donc des choses très partielles pour en faire une histoire partiale. C'est un peu comme si un jour les Allemands en venaient à réclamer de la part des alliés des excuses pour le bombardement de Dresde qui, à l'aune de notre vision actuelle des choses est bien un crime de guerre. On sait que ça a eu lieu, personne ne le nie, personne n'essaie d'en faire porter la responsabilité dur d'autres, comme les Soviétiques tentèrent de la faire après le massacre de Katyn. Tout ceci entre dans le domaine de l'histoire, donc des historiens dont le rôle est d'expliquer, pas de porter des jugements moraux sur tel ou tel événement. Sinon, nous n'en finirions plus. A chaque déplacement d'un chef d'Etat, celui pourrait commencer à faire l'inventaire des saloperies commises dans le passé, récent ou lointain par son pays dans le pays qui l'accueille. L'Algérie ne doit pas être un cas à part, surtout quand elle-même a tant de choses à se reprocher (massacres des Harkis, d'Européen, de militaires après l'entrée en vigueur des accords d'Evian, en particulier).

Quant à tourner la page, je ne crois pas que c'est en ressassant le passé, surtout quand on ne l'a pas connu comme c'est le cas de la majorité des Français et des Algériens encore en vie, en attendant des excuses sur tel ou tel point, en faisant un concours de victimisation, qu'on y parviendra. L'histoire a eu lieu. Depuis 50 ans, les choses ont changé. Les historiens ont à faire leur travail et ils ont déjà bien commencé. Ce n'est pas aux politiques d'un côté ou de l'autre de la Méditerranée de le faire. Leur rôle c'est de gérer un présent difficile des deux côtés, et de préparer l'avenir. Et si les intérêts de leurs pays coïncident, ils doivent être capables de dépasser des rancœurs souvent hypocrites car n'étant là que pour les mettre en valeur, et d'œuvrer pour le bien commun de leurs peuples respectifs.

1 commentaire:

  1. bonjour Expat, heureuse année dans ce beau pays, qu'il continue à vous rendre paisible, ici, la guerre civile serait peut être mieux que ces haines silencieuses générées par la confusion à tous les étages, le pire est à venir

    L'Afrique de haut en bas est un continent libre depuis longtemps, et je ne vois pas pourquoi la Suisse et ses banques et Paris et ses agents immobiliers auraient refusé d'abriter certaines fortunes africaines
    L'exploitation des terres précieuses? le genre humain a un cerveau universel et tout se négocie, le prix des minerais, le salaire des ouvriers, mais la redistribution salariale, c'est pas ça n'est ce pas... en Afrique
    il y a quelques jeunes africains qui parlent d'or et bossent pour un "projet pour l'Afrique"
    Si on pouvait éviter d'insulter De Gaulle ce serait bien, c'était un visionnaire, il n'y en a plus depuis et la décolonisation la liberté c'est lui, il a failli y passer
    plus tard un Dany le rouge l'a viré, presque nous deviendrions parano et penserions que l'Allemagne y trouva ses aises commerciales ....en Afrique
    Oui, Soustelle voulait garder l'Algérie et en faire une démocratie globale, une patrie...De Gaulle a du penser qu'il fumait de mauvais produits!

    j'ai vu "la Question", oui, j'avais 23 ans, c'était dans une MJC , en confidentiel, je fus en colère, j'ai grandi, je n'excuse rien, je ne fait que comprendre que nos hommes là bas ont du en baver comme dans toutes les guerres qui confrontent l'Orient et l'Occident le Nord et le Sud pour faire court, Expat, vous comprenez

    la colère , ça tient éveillé, c'est au moins ça, merci chers anonymes

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