"En ces temps difficiles, il convient d'accorder notre mépris avec parcimonie, tant nombreux sont les nécessiteux." Chateaubriand

dimanche 28 avril 2013

Quelle défense pour la France? (complément)


En complément à mes récents billets sur l'avenir possible de notre défense, il me semble utile de faire référence à cet article paru dans le Figaro à la veille de la parution du Livre Blanc de la Défense.
Pour rappel, un Livre Blanc fixe les grandes lignes de la politique de défense, en prenant en compte le contexte géopolitique présent et prévisible. De fait l'édition d'un nouveau Livre Blanc est assez rare (il n'y en a eu que trois depuis 1972) et correspond à des modifications majeures d'un équilibre géostratégique mondial. Le dernier datait de 2008. Il devait être révisé en 2012 pour prendre en compte les évolutions apportées par les "printemps arabes" et le désengagement des Etats-Unis d'Europe. Hollande a demandé à ce qu'il soit réécrit tandis que les grands équilibres mondiaux n'étaient pas fondamentalement bouleversés et que donc une simple révision suffisait. Peut-être encore la volonté pathologique de détruire l'œuvre de son prédécesseur, ou peut-être le désir de faire plier la réalité géostratégique et nos ambitions aux aléas budgétaires, puisque de tous les ministères c'est sur celui de la défense qu'on peut taper sans prendre le risque de voir débouler des furieux dans la rue.

Quoiqu'il en soit les choses sont faites, même si elles ont pris du retard, à cause en particulier de l'intervention au Mali qui a occupé le Ministère.
Que faut-il en retenir?

Tout d'abord que les choses ne se sont pas passées très sereinement : "Déficit de pilotage de l'exercice", "autoritarisme du ministère de la Défense", "vision trop optimiste de la situation", "absence de suivi de l'Élysée", voilà ce qu'en disent es membres de la commission.
Ensuite que les contraintes ont été fortes. La difficulté a été de concilier les réalités stratégiques et les contraintes budgétaires. "Dès le départ, il y a eu une contradiction majeure entre la lecture du monde, qui n'est pas plus stable qu'en 2008, et les restrictions budgétaires, incontournables. Les membres de la commission ont eu du mal à regarder en face cet antagonisme" cite une source près du dossier.
U coup les ambitions en matière de défense ont été revues à la baisse avec un recentrage dur l'Europe et l'Afrique et l'abandon de nos ambitions en Asie. Le contrat opérationnel a été divisé par deux, passant d'un engagement sous délais très rapides de 30000 à 15000 hommes, ce qui fait peu, semble insuffisant eu égards aux menaces décrites, et laisse à réfléchir quand on mobilise plus de 50000 policiers et gendarmes pour le réveillon du nouvel an (le danger serait-il devenu intérieur aux yeux de nos gouvernants?).
Nous voilà donc parti pour un modèle de défense au petit pied, certes moins grave que dans l'hypothèse soutenue par Bercy et dont j'avais parlé qui revenait purement et simplement à sacrifier l'outil de défense. On ne peut guère dire que l'essentiel est sauvé dès lors qu'on va passer de 1,5% par rapport au PIB de dépenses militaires à 1,35. Cette diminution impliquera une dégradation progressive de la situation, en capacités humaines et matérielles qui ne pourront être corrigées que par une injection massive de crédits dans les prochaines années. Si ce n'est pas le cas, la France subira un énorme déclassement en termes de capacités de défense.

Personnellement, je pense que le problème de la défense a été traité comme tant d'autres, plus sévèrement parce que même si le poids social n'est pas à négliger, ce n'est pas dans la rue qu'il se traduira. Par ailleurs électoralement c'est davantage payant de flatter la croupe des enseignants, sans discernement et sans s'attaquer aux structures, que de garantir aux militaires les moyens de leurs missions, pas tant pour des raisons d'opinions politiques que pour des questions de volume.
L'Elysée a suivi ça de loin, s'en tenant à un vague compromis entre les comptables de Bercy qui ont vu u gisement d'économies faciles et les experts de la défense. Bercy reviendra à la charge, n'en doutons pas. La réalité géostratégique, de son côté, ne s'adaptera pas à nos contraintes budgétaires. En attendant, le président, comme à son habitude courbe l'échine, espérant que ses non-choix n'auront pas de conséquences (en gros, c'est prions pour que les menaces ne se manifestent pas) et attend pour repasser le bébé à son successeur qui décidera de redresser la barre ou pas. Sans doute pas d'ailleurs ou insuffisamment si on considère l'effort de rattrapage qu'il y aura à faire.

http://www.lefigaro.fr/international/2013/04/26/01003-20130426ARTFIG00541-la-france-recentre-sa-politique-de-defense.php

 

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