"En ces temps difficiles, il convient d'accorder notre mépris avec parcimonie, tant nombreux sont les nécessiteux." Chateaubriand

jeudi 11 juillet 2013

Le dérapage, expression d'une pathologie moderne




Il ne se passe désormais guère une journée sans que cette nouvelle pathologie, dont les symptômes sont souvent décrits de manière aussi vulgaire qu'imagée, cela aidant le péquenot de base à comprendre, se manifeste ici où là, dans les médas, lors de discours, dans la rue, sur les blogs et même, nous en aurons confirmation lorsque Big Brother aura terminé son œuvre, sans doute sous la couette.
Cette maladie n'a pas de nom ou en a trop.  Aussi me risquerai-je à une tentative de synthèse, pas très originale en vérité puisqu'elle s'appuie sur le nom commun donné au symptôme, en la nommant dérapagite. Reconnaissez avec moi que c'est plus simple que de la nommer successivement et alternativement en fonction des circonstances, de ses victimes qui, curieusement, et ce qui fait en partie l'originalité de cette pathologie, ne sont pas ceux qui en sont atteints, donc que de la nommer au gré des circonstances, racisme, xénophobie, islamophobie, homophobie, ethnocentrisme, patriotisme, nationalisme (les deux derniers étant souvent confondus, mais quand on aime on ne compte pas). Cette liste n'est évidemment pas exhaustive et je laisse le soin à celles et ceux qui ont ce don inné pour diagnostiquer le mal dont il est question de la compléter. Pour ma part j'en resterai à dérapagite, ce qui me parait d'autant plus avisé que les mêmes sont souvent diagnostiqués comme atteints des diverses formes que peut prendre la maladie. Ainsi, par exemple, le grand pathologiste Pierre Bergé, bien qu'atteint lui-même précocement de cette autre maladie décrite il y a longtemps par le général de Gaulle et qu'on pourrait nommer naufragite, donc le grand spécialiste toujours au chevet de notre société en danger démontrait il y a quelque temps avec ferveur et compétence que l'homophobie qui s'exprimait dans les rues de la capitale était assimilable à de l'antisémitisme. Quelle objection apporter à un avis aussi autorisé? Aucun, bien entendu.


Mais revenons à cette maladie qui ne manque pas d'intérêts tant elle est singulière et tentons d'en décrire les caractéristiques majeures avant de passer aux moyens de la combattre.

J'ai déjà cité une de ses particularités. : ceux qui en sont atteints n'en sont pas les victimes. Du moins en premier ressort car il arrive, et ce n'est que justice, que les malades en soient indirectement victimes. Nous appellerons ça l'effet boomerang ou justice pas divine celle-là. Mais ce point sera abordé quand nous traiterons des moyens de prophylaxie.

Une seconde particularité est qu'elle touche prioritairement  et presque exclusivement des gens classés à droite. Il semblerait qu'être de gauche et surtout le clamer haut et fort garantissent une immunisation puissante contre la maladie. D'ailleurs, et c'en est une démonstration irréfutable, les gens de gauche touchés par la maladie sont immédiatement classés à droite, la nauséabonde cela va sans dire. C'est une décision unanime des grands diagnostiqueurs à laquelle il faut bien se plier.
Elle se manifeste par ce que les mêmes diagnostiqueurs pensent être des aberrations verbales, voire écrites. Ce point est intéressant car un des grands problèmes de la dérapagite est que souvent ceux qui en sont atteints ne sont pas conscients de ces aberrations, donc d'être atteints par la maladie. Un peu comme les fous, donc. L'analogie pourra resservir. En effet, souvent les malades pensent juste décrire ce qu'ils voient, faire des analyses des constats qu'ils peuvent faire, et en tirer certaines conclusions. Et là c'est évidemment grave puisque les gens sains ne peuvent raisonner de cette façon. Tout esprit normal doit partir d'un monde idéalisé, et donc tenir des discours en phase avec ce monde en faisant abstraction des faits sauf à les imputer à d'autres maladies ravageuses, comme par exemple le capitalisme ou le post-colonialisme. Là-aussi des spécialistes éminents pourront compléter utilement.

Cette maladie est contagieuse, même si elle ne frappe généralement que des gens qui y sont prédisposés, peut-être à cause d'une déficience immunitaire liée à un ancrage à des valeurs évidemment désuètes ou plus prosaïquement à cause d'une confrontation quelquefois violente avec la réalité, par exemple se trouver dans un certain RER un certain jour à une certaine heure. Mais là aussi on comprendra que les gens qui succomberaient à la tentation de considérer leur vécu au premier degré, sont des esprits assez faibles pour être victimes de la dérapagite. Car, j'avais omis de le préciser, cette maladie ne vous procurera  ni mal au crâne, ni des douleurs insupportables pendant la miction : c'est une maladie de l'esprit. Tiens! On rejoint le thème de la folie déjà évoqué. Le processus de contamination est souvent nommé lepénisation des esprits, en référence à un vieux borgne familier des dérapages.
Les effets de la contagion sont terribles, car, si les gens de gauche sont réputés immunes, ceux qui ne le seraient pas ayant subi le changement de bord évoqué, tout le monde peut être touché, du prolo de base, appelé communément le peuple, aux élites, ceci jusqu'aux plus hauts sommets. N'avons-nous pas eu un président de la République atteint de dérapagite?
Si cependant une part non négligeable de la classe politique est atteinte, nous constatons en nous en réjouissant que les journalistes sont généralement peu atteints. Ceux qui le sont sont suffisamment peu nombreux pour pouvoir être répertoriés périodiquement par Dély dans une chronique du Nouvel Obs. "No pasaran" pourrait être le titre de cette chronique censée éclairer le bon peuple sur les lectures à éviter et donc, partant, contrer la propagation de la maladie qui se transmet de préférence par les  yeux et les oreilles.


J'utiliserai ce combat d'un homme et de son journal comme transition pour parler un peu de prophylaxie.  
Avant d'entrer dans le détail, il me faut souligner que cette lutte cotre la propagation de la maladie a comme caractéristique principale d'être le combat permanent de tous contre les autres.
La permanence du combat  se traduit par une vigilance de tout instant vis-à-vis de tout ce qui se dit ou s'écrit et par au minima, avant de passer aux choses plus sérieuses, une dénonciation sans nuance de tout symptôme laissant à penser, non pardon, permettant d'affirmer sans ambages, qu'un tel ou une telle, ne les oublions pas car cela est aussi un symptôme, est  atteint le la honteuse maladie qui n'est pas pour autant une maladie honteuse, au sens traditionnel qu'on donnait à certaines maladies qu'on ne criait pas sur les toits. Au moins peut-on espérer de la pénicilline pour les secondes qui n'a aucun effet sur la première.
Et c'est effectivement le combat de tous et de toutes contre les autres, car chacun peut dans un moment d'oubli se laisser aller à des assemblages douteux de mots. Notons tout de même que certaines personnes auront droit à une demande d'explications ou de précisions dans la mesure où elles étaient identifiées  jusqu'à présent comme faisant partie des veilleurs. J'espère que ce mot désormais connoté n'aura offusqué personne.

Voyons maintenant les divers moyens utilisés pour stopper la propagation de cette fameuse dérapagite, cette pathologie qui si les veilleurs relâchent leur attention risque de nous rnvoyer aux heures les plus sombres de notre histoire.

Cette lutte est assez particulière car elle s'articule autour d'un axe qui, et afin d'atteindre, pardon d'épargner de la maladie, un maximum d'individus, car les moyens chirurgicaux ne sont réservés qu'à une élite, qui consiste davantage  que d'empêcher l'expression délirante des malades de faire en sorte que ces derniers répriment eux-mêmes leurs mots. Mais les moyens chirurgicaux évoqués participent activement à cette auto-censure que s'infligent es malades.

Commençons donc par la chirurgie.
Cette dernière est rendue possible, au moins partiellement, par une action préalable du législateur, qui dans sa grande sagesse, selon l'expression consacrée, a jugé utile de fixer des limites à l'expression quant il s'agit d'aborder certains sujets. Pour mémoire on rappellera entre autres,  les funestes lois Gayssot et Taubira de nature toutefois différentes, la première étant une tentative, absurde à mon sens de lutter contre le négationnisme, tandis que la seconde, occultant une part importante, la part la plus importante d'ailleurs, d'un vaste sujet consiste à désigner des coupables dont une des caractéristiques est d'avoir la même couleur de peau. Inutile d'épiloguer ici, j'ai déjà parlé de ceci dans d'anciens billets. Mais pour revenir au législateur, celui-ci a décidé de sanctionner une bonne partie des manifestations de la dérapagite: le racisme et l'homophobie notamment. S'agissant du racisme, on constatera qu'il a une vaste définition puisqu'attaquer une religion ou des manifestations religieuses, comme par exemple la critique des prières de rue peut vous valoir une mise en examen pour incitation à la haine raciale. Peut-être un pas a-il été franchi vers la pénalisation du blasphème. Mais rassurons-nous, seul l'islam semble être concerné ce qui laisse un large champ encore ouvert à la critique des autres religions. A-t-on jamais vu en effet quelqu'un fustigeant par exemple la religion catholique se voir trainer en justice pour incitation à la haine raciale?

Le cadre juridique ayant été grossièrement tracé, voyons maintenant qui sont les petites mains qui peuvent permettre à cet arsenal de fonctionner.
Nous avons, pour commencer les veilleurs. Alors les veilleurs, c'est un vaste monde, chacun pouvant se porter partie civile ou dénoncer des propos qu'il pense tomber sous le coup de la loi. Mais parmi ce beau monde, nous avons des professionnels. Je pense en particulier aux associations contre le racisme dont on peut louer l'activisme forcené. Cela devant évidemment nous rassurer puisque ce sont nos impôts qui leur permettent de prospérer. Au moins ce n'est pas de l'argent foutu en l'air. Dès lors que vous avez une certaine notoriété et que vous dérapez, comme in dit, pas de problème, vous êtes assuré de vous retrouver devant un tribunal suite à une plainte d'une de ces associations. Comme Estrosi par exemple contre lequel SOS racisme a porté plainte, d'ailleurs de façon assez inattendue puisque cette association ne défend jamais les blancs victimes de racisme. Or, les gens du voyage… Remarquez, il y a aussi une assertion sur les rapports de l'islam avec la démocratie. L'explication de l'intervention de SOS est sans doute là.

Mais ceci n'est que théâtralisation. Il y aura bien toujours un Zemmour, un des deux Le Pen, un Ménard, un Estrosi, une Lévy  et bien d'autres encore pour laisser échapper des manifestations de leur maladie et permettre cette pantomime. C'est ailleurs que réside l'essentiel bien que cette théâtralisation en soit un des piliers essentiels. Car à partir d'elle on peut créer une jurisprudence, faire en sorte que constater certains faits, comme un taux anormalement élevé de certaines catégories de la population en prison, devienne tabou. Si vous le savez, le constatez, en avez la preuve, ne le dites surtout pas.
Non l'essentiel c'est ces notions de bien et de mal dans l'expression qui ont gagné les esprits. C'est ainsi qu'on circonscrit la maladie. Même les gens les plus malades, atteints de dérapagite, accompagnent très souvent leurs propos de malades par des nuances en atténuant la portée. "J'ai dit ça, peut-être, mais sachez quand même que je condamne ceci et cela et que donc mes propos ne sont pas ceux que vous pourriez penser sans cette précision". Ouf! Malade peut-être, mais la guérison est encore possible! Mais enfin, ça ne suffira pas toujours, car les thérapeutes, nos veilleurs de nuit, de jour, savent se montrer intransigeants. Pas de relâche dans ce métier, même si c'est le second pour la plupart, ces relais des médias et associations. Nous blogueurs pouvons le constater régulièrement que la vigilance reste entière.
Ce processus n'est évidemment pas nouveau, même s'il prend de plus en plus de relief. Il génère des gens honteux, parce que se croyant atteints de la maladie et qui n'ont que le secret de l'isoloir pour exprimer anonymement ce qu'ils pensent, enfin pour encourager ceux des malades qui ont dépassé ce stade de la honte et qui ont compris que la libre expression de leur pathologie et la publicité qui en est faite avec ces dénonciations publiques, ces procès est un sacré atout pour eux. C'est devenu le cauchemar des sondeurs.

L'idée générale, l'axe auquel je faisais allusion tout à l'heure est donc bien celui-là: mettre l'expression sous camisole, on en revient à l'évocation des fous, mais tout en prenant garde à ce que les pathologies puissent quand même sporadiquement s'exprimer. Il faut bien en effet que réside une menace d'épidémie pour ne pas avoir à jeter les clés de la camisole.

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